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Lettre d'excuse


Je m'excuse d'aimer les librairies, de me réjouir des couvertures toujours plus originales des ouvrages, de célébrer le craquant d'un livre neuf. J'ai souvent délaissé les trop silencieuses bibliothèques, leur classement certes pratique mais dont l'architecture me rappelle l'étouffement studieux de l'école. Je m'excuse d'avoir gardé pour moi les livres qui me sont essentiels - mais tous ceux que j'ai prêtés sans espoir de retour me manquent-


Je m'excuse d'avoir ignoré les Boîtes à Livres


Les "Boîtes à livres" fleurissent sur les chemins les plus inattendus. Elles portent la marque de l'incroyable intelligence de leur créateur qui méritent qu'on les mettent à l'honneur. La déchèterie pourrait être l'endroit le moins fréquentable, enveloppé dans un mélange de poussière et de mauvaises odeurs. Pourtant, une équipe (Déchèterie de Saumur) l'a transformée en un agréable lieu de pèlerinage dominical dédié au Dieu "Recyclage" ; tout semble parfaitement organisé et fluide.


Coincé entre les bacs de cartons et de verre, lové ingénieusement dans le sein d'une benne en plastique, reposent des livres en attente d'attention. J'aime cette rencontre inattendue au milieu des rebuts, l'espoir que de partout peut émerger et être partagés la beauté, le savoir, la douceur, la promesse d'un voyage. Un livre au milieu d'une déchèterie c'est l'idée que la littérature dans tous ses genres n'est pas réservée aux salons et ses codes mais qu'elle peut fleurir partout.


Jeter mes déchets a désormais un piquant particulier ; je me demande chaque fois quelle rencontre m'attend le nez penché dans la boîte à livres : des livres pour mes petits-enfants, des livres savants qui ne sont plus réédités, des livres que je n'aurais jamais achetés, des livres qui parlent des étranges lectures d'autrui, des livres d'un autre temps, des mots coincés entre les pages, des auteurs oubliés.


Cette semaine, je suis tombée sur Raphaëlle Billetdoux et sa Lettre d'excuse. Le livre est pratiquement neuf, sa couverture un peu pliée avec le chiffre 62 écrit au crayon à papier. 1972. C'est l 'histoire d'une femme qui dit ce qu'elle a sur le cœur lors d'une soirée puis s'en excuse et s'en explique par courrier (papier et crayon) auprès de ses invités. Bien au-delà de ce qu'ils voudraient entendre... Livre d'un autre siècle, pas tout à fait palpitant, très bien écrit. Extrait.


Le personnage central raconte un souvenir d'enfance ; elle est malade et regarde un livre qui ne lui est pas destiné.


"Jamais je ne m'étais sentie aussi violentée par des mots exprimant des états auxquels je pensais ne rien comprendre mais qui m'atteignaient sourdement et me rendaient solidaire des plus confuses souffrances, comme si j'entendais du bruit fait par mes parents derrière le mur, sans pourvoir en reconnaître l'origine. Était-ce le fait de la maladie, était-ce le texte lui-même, venait s'engouffrer en moi au fil de la lecture une profusion d'images en couleurs qui me donnaient en perspectives toutes distordues les reliefs excitants du monde physique dans lequel se déroulait ce drame, sans que j'y visse jamais quoi que ce soit fût d'anormal."


Et vous de quoi vous excusez-vous ? Fréquentez-vous les boîtes à livres ? Quelle est votre expérience ? Partagez la photo de votre boîte à livres sur ma page FB Ecriture, Art et SoulCollage® https://www.facebook.com/soulcollagefrancophone/

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